Il est des voyages qui deviennent inoubliables, par on ne sait quelle alchimie. Ce voyage au coeur du Mustang à la recherche du chainon manquant et vers le Bhrikuti restera pour moi infiniment gravé dans ma mémoire.
Merci à tous mes compagnons de voyage pour ce très beau cadeau, en cette période particulièrement difficile au Népal.
« Et, c’est pas fini… »
Petit voyage en photos… en attendant le prochain épisode.
« Un petit bout de nous même est encore tout la bas au fin fond du Mustang accroché au regard de ses habitants courageux et attachants, gardiens d’une culture que nous n’imaginions pas et certainement inspirée par les paysages atemporels, extraordinaires de ce royaume caché. » Christophe.
Après le Manaslu, de retour à Kathmandu, voici quelques impressions… post tremblement de terre.
Une histoire de cadrage ?
Il y a les gros plans, presque insoutenables des visages déformés par les pleurs et la douleur. Il y a les plans très serrés des maisons détruites, des splendeurs du passé réduites à des tas de briques informes. Des villages entiers détruits, des vies aussi.
Pourtant, il est temps maintenant d’ouvrir le cadrage des images et des émotions. De voir plus large, en un zoom qui engloberait l’ensemble des réalités. Les larmes comme les sourires de la vie, au coin de la même rue.
Partout au Népal, la vie reprend son cours… Comme un grand fleuve, la vie s’écoule.
Et un beau poème de Paul Eluard, partagé par Isabelle résonne dans mon coeur.
«La nuit n’est jamais complète Il y a toujours, puisque je le dis Puisque je l’affirme Au bout du chagrin une fenêtre ouverte Une fenêtre éclairée Il y a toujours un rêve qui veille Désir à combler, faim à satisfaire Un cœur généreux Une main tendue, une main ouverte Des yeux attentifs Une vie à se partager.»
Paul Eluard, Le Phénix
D’un bleu intense, dans les avenues de la ville, les Jacaranda sont en fleur. La circulation est presque fluide. Les gros titres des journaux annoncent que les fonds colossaux récoltés auprès de généreux donateurs vont être gérés «efficacement» par le gouvernement. Quelques petites voies s’inquiètent pour les zones reculées, sur l’insuffisance de tentes et de bâches pour abriter les sans-abris avant l’arrivée de la mousson.
J’essaye de rassembler les impressions vécues en montagne, à notre retour. J’essaye de rassembler les morceaux de ce puzzle géant, tellement contradictoire.
Sur mon carnet de bord :
«A Sama, des groupes de femmes transportent le mol dans des Dokos, qu’elles déversent dans les champs en de petits dômes bien alignés. Il s’agit de préparer les champs pour planter rapidement les pommes de terre. Pendant ce temps, les hommes réparent les maisons, principalement les toits en prévision de la mousson qui arrivera dans moins d’un mois. »
« A Samdo, une seule maison semble avoir été endommagée par de gros rochers qui ont dévalé la pente. Mais les toits ont beaucoup soufferts car toutes les lauzes ont bougées lors des secousses. Pour l’instant, il y a surtout trop de neige au Larkye Pass pour ramener les yacks et les chevaux qui ont passé l’hiver versant Tilje et le travail des champs débute doucement.»
Une nouvelle secousse nous surprend à Bhimthang. Quelques murs des nouveaux lodges s’effondrent, cela semble presque normal. Gita, la patronne, garde le sourire en se précipitant dans la cour.
Plus bas, sur le Tour des Annapurnna, pas ou très peu de signes des séismes. Et surtout, pas un seul touriste ! L’ambiance est très étrange, presque irréelle de calme. Pour les propriétaires des lodges, la saison du printemps est terminée. Ils espèrent seulement que l’activité va reprendre à l’automne.»
Et maintenant…
Les urgences ont été traitées, les équipes de secours rentrent chez elles, que répondre à toutes les personnes qui se posent la question «Et maintenant… Comment aider les népalais ?».
Peut-être, tout simplement en reprenant les chemins de Kathmandu, en préparant un prochain voyage au Népal, un trek ou une expé. Et en relançant ainsi l’économie du tourisme. Faire ce que nous savons faire. Maintenant et demain, donner du travail plutôt que des sacs de riz…
De notre côté…
Notre voyage au Mustang a été maintenu. Malgré incompréhensions ou inquiétudes de nos proches ou de gens «bien pensants».
Nous pourrons ainsi donner à notre retour des informations précises sur la réalité du trek au Mustang pour les prochains voyageurs de l’été.
Tout va bien se passer. Même si la terre tremblera peut-être encore, et nous aussi.
Et dans ce monde où tout bouge, une seule certitude
en Himalaya,
la terre ne va pas s’arrêter de bouger
comme par magie.
« Et, c’est pas fini… »
Voici une expression qui est revenu souvent dans mes propos.
A chaque exclamation de surprise devant un paysage superbe, au tournant d’un sentier, au sommet d’un col.
Chaque jour, chaque étape fut différente de la précédente, une surprise sans cesse renouvelée… vers un toujours plus qui forcément c’est arrêté un jour à Konchok Ling.
Ce fut un grand et beau voyage, un bonheur rare et partagé.
Notre entrée dans le Mustang.
De Tangye à Dhye, en route vers le Camp de base du Khumjungar.
Préparation vers l’altitude.
Un voyage dans le grand blanc, sur le Haut Glacier du Khumjungar.
J1, l’installation du camp d’altitude, au pied du Futi Himal
J2, une journée à la carte et en aller-retour, pour laisser le temps à l’équipe népalaise de nous rejoindre. Et pour notre plus grand plaisir…
J3. La journée de la traversée.
Nous avions comme projet de nous approcher du Bhikuti en traversant le petit sommet du Tara et pour que chacun se rendent compte des conditions réelles. Mais au final, j’ai préféré traverser directement pour installer le camp suivant et limiter les efforts pour l’équipe népalaise.
J4. Un sommet d’alpinisme à la carte, puis le début de la descente vers le French Camp.
Un retour plus difficile que prévu…
Pas de doute, je sais maintenant pourquoi il ne faut pas essayé de descendre en rive gauche du glacier, mais faire un grand détour par Thulo Dunga Camp.
Et aussi, pourquoi il est pertinent de s’arrêter au retour d’un sommet au dernier camp, sans vouloir à tout prix descendre.
Nous ferons donc un dernier camp improbable dans les éboulis. L’équipe Népalaise décidera de continuer jusqu’au French Camp, pour un Dhal Bath à deux heures du matin. Quel bambée !
Mais surtout la fin de l’itinéraire nous réservera quelques surprises.
En conclusion…
Le sentier entre Japanese Base Camp et Tulo Dunga Camp, en rive gauche a été complètement détruit par un glissement de terrain gigantesque et la zone parait encore relativement active et donc dangereuse.
Les premiers groupes de l’automne seront confrontés à la nécessité de changer d’itinéraire, avec un cheminement sur le moraine de l’autre rive, à gauche en montant. Après quelques passages, un sentier devrait apparaître rapidement. Le terrain est juste un peu compliqué au début.
Une journée de repos au French Camp.
Une histoire de poubelles.
Ce sujet me met radicalement en colère, tellement il est caricatural d’un fonctionnement à la népalaise.
Il faut s’avoir que le ministère demande à chaque expé de faire un dépot d’argent (500 $) pour garantir la bonne gestion des déchets.
Au retour, au chef d’expé de présenter un document de l’autorité locale attestant des bonnes pratiques en matière de gestion des déchets par les membres de l’expédition. Bien sûr, il n’y a aucun contrôle et le document en question est parfaitement bidon. Mais il y a pire, pour notre expé, à l’arrivée à Kathmandu nous avons acheté des déchets pour les présenter au ministère pour attester de notre bonne foi. De qui se moque t’on ?
Une histoire de chaussures…
Pour préparer une prochaine page sur les chaussures d’expédition. Et surtout pour répondre à la question : « quelle chaussure choisir pour un voyage comme celui ci, avec une traversée de plusieurs jours entre 6000 et 6500 m et au printemps.
Au sujet des Bhrikuti.
De nouveaux sommets ont été baptisé…
Il peut sembler prétentieux de choisir un nom pour un sommet en Himalaya, puis d’en parler et même de les faire exister sur une carte.
Pourtant, je pense que l’alpinisme est un formidable vecteur d’expériences, d’émotions et de récits de ces expériences. Sans histoire à raconter, il n’y a pas d’alpinisme. Et pour cela, il faut que les sommets aient des noms bien identifiés et si possible avec une réelle signification, soit des noms locaux et en l’absence des noms donnés par les alpinistes eux-même.
Quand j’explique cela à Miss Hawley, l’histoire de l’Everest ou de Denali est bien présente, en arrière plan. Elle m’écoute avec un petit sourire aux lèvres, mi désapprobateur («il ne faut pas donner le nom d’une personne à un sommet»), et mi flatté (quand je lui explique que donner son nom à un sommet de l’Ouest est pour moi une réelle reconnaissance pour tout ce qu’elle a apporté à la communauté internationale des alpinistes et que cela me semble juste).
Bref, il faut que les sommets aient une véritable identité, un nom et une altitude (ou deux altitudes sur la frontière Chinoise, en fonction des deux cartes officielles utilisées par le ministère).
Pour nous, dans ce petit massif du Damodar, nous nous sommes creusé la tête pour trouver des noms agréables, poétiques ou drôles pour les quelques sommets sans nom que nous avons gravis.
Il y avait déja sur la carte XXX chez Himalayan Map House HMH:
Le Futi Himal, xxx m
Le Lena Peak, xxx m
Les cols du Tangye La et du Dhye La, d’un coté et de l’autre du Futi Himal.
Et maintenant en plus :
Le Dawa Gaze, 6402 m.
Le Keiko Kangri, 6655 m.
et Tara, 63xx m.
N’en déplaise aux grincheux…
Une réglementation inadaptée.
C’est un sujet difficile car en contradiction avec la réalité d’aujourd’hui.
Comment expliquer aux fonctionnaires du ministère du tourisme qu’il existe d’autres possibilités de règlementation des ascensions himalayennes que celle appliquée actuellement, sans nuire aux logiques d’un contrôle des déplacements et d’une ressource économique ?
En bref, que l’Himalaya ne se résume pas à un seul sommet, l’Everest, et tout ne doit pas être forcément calqué sur lui.
Premier constat, la réglementation népalaise ne prends pas en compte les réalités de l’alpinisme d’aujourd’hui en Himalaya, et particulièrement sur les petits sommets ou les massifs secondaires comme celui du Damodar Himal.
Surtout, cela limite le potentiel d’attraction d’un massif, car beaucoup de sommets ne sont pas autorisés.
Concrètement, je suggère de créer un permis global par massif, sans nom de sommet défini qui donnerait la possibilité de gravir un ou plusieurs sommets du massif en une durée bien définie.
Par exemple, un permis pour le Damodar Himal, le Gorak Himal ou le Limi Himal.
Il me semble intéressant de commencer cette réflexion par l’Ouest du Népal, qu’il faut vraiment valoriser et promouvoir.
Concrètement, c’est assez simple, il suffirait pour l’Ouest du Népal, de prendre la carte générale, d’identifier les massifs secondaires, d’en préciser les limites géographiques et les accès, et de leur donner un nom.
En excluant éventuellement les sommets de 7000 m ou de plus de 6500 m.
Cela nécessite surtout de vouloir faire quelque chose pour une réflexion approfondit sur le sujet.
Mais qu’en pense mes «amis» of the Ministry ?
Le début du retour, de Damodar Kunda à Lo Manthang.
Pour ne pas oublier une certaine réalité d’un certain printemps.
Et pour dire encore qu’il faut aller à Baktapur !
« Et c’est encore pas fini… »
Le projet du printemps prochain se prépare doucement.
Voici déjà quelques photos des montagnes que j’aimerais visiter. Aucun nom, bien sûr. Mais surtout nous n’avons aucune idée de la manière d’atteindre le camp de base. De nouveau, un projet résolument exploratoire au printemps 2016.
Avis aux amateurs…
Et si vous avez des questions, si ce voyage vous intéresse, n’hésitez pas à me contacter dès à présent.
Voilà, c’est terminé.
Mais avant de clore cette page, à vous de jouer. Que pensez-vous de cette forme de compte rendu ?
Avez vous des suggestions ?
Des critiques ?
N’hésitez-pas à laisser un commentaire ou a partager cet article avec vos amis.
Bon été à tous
Paulo_à La Grave par une belle journée
Le 28 juin 2015
5 réflexions sur “Au pays de Ridzong Gonpo, printemps 2015”
martine mirigay marchal
Bravo et merci pour ce beau reportage qui ne peut que donner envie de repartir avec Paulo.ça me rappelle que d’excellents souvenirs .et le parcourir le matin en se réveillant,c’est un vrai bonheur et se donner l’espoir de participer tres prochainement à un nouveau projet (santé rétablie)
Question: pourquoi les trecks dans cette région se programment-ils au printemps?
Bises getoises
Merci Paulo pour ces photos qui traduisent bien ce beau voyage. Il traduit avec fidélité cette exploration du chaînon manquant avec les surprises qui vous ont fait certainement un peu souffrir sur le retour. Félicitations à tous.
Bises.
Superbe voyage Paulo, j’ai de très bon souvenir de Dhye que j’avais visité il y a quelques années. L’itinéraire entre Dhye et Tanggye est splendide. Le passage des gorges pour rentrer a Dhye est aussi quelque chose!
Comment vont les panneaux solaires qui alimentent en électricité la meule du village? C’est un français qui a appuyé l’initiative si mes souvenirs sont bons.
J’espère que bientôt les permis du Mustang baisseront pour permettre plus de tourisme dans cette région merveilleuse.
Merci, Paulo, pour vos récits. On vous remercie d’autant généreuse et tres utile renseignement et bon sens. On vous suive depuis la Catalogne et l’Andalousie. Nous partageons avec toi l’amour pour ce coin du Nepal que, peut-etre, sera notre prochain projet de montagne
Vous êtes presque le dernier alpiniste explorateur !
Salutacions depuis Sierra Nevada
Bravo et merci pour ce beau reportage qui ne peut que donner envie de repartir avec Paulo.ça me rappelle que d’excellents souvenirs .et le parcourir le matin en se réveillant,c’est un vrai bonheur et se donner l’espoir de participer tres prochainement à un nouveau projet (santé rétablie)
Question: pourquoi les trecks dans cette région se programment-ils au printemps?
Bises getoises
Bonjour Martine et merci de ton petit mot.
Et pas de souci… 2016 sera une année Mustang ! Avec aussi un voyage à l’automne.
Bizs himalayennes Paulo
Merci Paulo pour ces photos qui traduisent bien ce beau voyage. Il traduit avec fidélité cette exploration du chaînon manquant avec les surprises qui vous ont fait certainement un peu souffrir sur le retour. Félicitations à tous.
Bises.
Jean-Do
Superbe voyage Paulo, j’ai de très bon souvenir de Dhye que j’avais visité il y a quelques années. L’itinéraire entre Dhye et Tanggye est splendide. Le passage des gorges pour rentrer a Dhye est aussi quelque chose!
Comment vont les panneaux solaires qui alimentent en électricité la meule du village? C’est un français qui a appuyé l’initiative si mes souvenirs sont bons.
J’espère que bientôt les permis du Mustang baisseront pour permettre plus de tourisme dans cette région merveilleuse.
Merci, Paulo, pour vos récits. On vous remercie d’autant généreuse et tres utile renseignement et bon sens. On vous suive depuis la Catalogne et l’Andalousie. Nous partageons avec toi l’amour pour ce coin du Nepal que, peut-etre, sera notre prochain projet de montagne
Vous êtes presque le dernier alpiniste explorateur !
Salutacions depuis Sierra Nevada
Ferrán