Les modes de vigilance encadrée développés par Alain Duclos sont au coeur de ma pratique de ski de randonnée, à la fois dans la préparation, le déroulement et le débriefing d’une sortie.
C’est un outil important du « Faire ensemble » que nous avons présenté dans un précédent article avec Dominique Ansel, « Faire ensemble en ski de randonnée, quelques repères scientifiques« .
Note d’intention.
Le sujet de cet article est de présenter un outil opérationnel très concret, facile à mettre en place dans la préparation, à vivre durant la rando et à évaluer, post sortie.
Mais il nécessite réellement d’ancrer sa pratique dans un projet construit sur un mode participatif où le leader est particulièrement attentif à un rôle d’enseignant et d’accompagnant. Le « Faire ensemble » avec ses méta règles étant un moyen, une manière de faire complémentaire au 3 x 4, à la disposition du leader et surtout partagé avec tous les participants.
Ces différentes notions nécessiteront bien sûr d’être explicitées et approfondies dans des publications ultérieurs.
Voici une approche pédagogique des vigilances avec une nouvelle représentation et des exemples concrets des différentes postures du leader et des membres du groupe.
En partant de la proposition d’Alain Duclos :
A retrouver sur le site dédié aux avalanches d’Alain Duclos : Data Avalanche
Et en particulier cette animation.
Les modes de vigilance et les 6 paramètres associés sont l’un des outils d’aide à la décision que j’utilise systématiquement lors de mes sorties de ski de randonnée. Ces modes de vigilance sont toujours présentes lors de mes préparations avec mes compagnons et lors du débriefing. Comme précisé précédemment, la vigilance encadrée s’inscrit dans un mode de fonctionnement où le leader en ski de randonnée a d’emblée une fonction de formateur, d’animateur et de garant de la notion de projet participatif (en plus de celle, indispensable, de garant de la sécurité du groupe).
Le slogan de mon hiver 2020 était…
« Il faut étendre le mode DETENDU »
pour encore mieux utiliser ces modes de vigilance, qui semblent si simples.
Pour cela, je propose d’associer à chaque mode de vigilance une posture du leader dans un registre pédagogique précis mais également pour les membres du groupe, comme un espace défini d’apprentissage ou d’évolution.
Modes de vigilance et pédagogie
Concrètement :
« LAISSER FAIRE», «FAIRE AVEC», « FAIRE FAIRE», « FAIRE SOIT-MÊME » et aussi « RENONCER À FAIRE et Construire un nouveau projet »
Ces différentes manière de FAIRE expriment la distanciation, l’implication du leader face à l’action en train de ce réaliser.
- La vigilance DÉTENDU est le lieu privilégié d’un apprentissage « learning by Doing » où une large place peut être laissé à l’expérimentation (de l’art de faire la trace et de conduire le groupe par exemple).
Le mode DETENDU peut également être schématisé comme « le mode du risque ZERO », qui existe bel et bien.
Le « LAISSER FAIRE », malgré sa dénomination a peu a voir avec les théorisations des pédagogies non-directives dans le courant de pensée post 68 (A. S. Neill avec « Libres enfants de Summerhill », par exemple).
Ici, pour que la personne en charge de la trace puisse en réaliser une de qualité, il est nécessaire pour le leader de préciser préalablement les critères qualitatifs d’une « bonne » trace à l’ensemble du groupe. Puis, de laisser cette personne réaliser sa trace comme elle le veut (ou le peut). Une organisation en binôme est également possible pour initier une entraide, une analyse et une collaboration entre deux personnes.
Puis, à chaque passage de relais, une discussion peut s’engager pour analyser la tache réalisée.
Cette posture du « LAISSER FAIRE» n’est pas simple à mettre en place et surtout à assumer par le leader. On voudrait que celle-ci soit d’emblée parfaite. Comment réagir avec bienveillance quand elle est vraiment nulle, ? C’est aussi notre signature et notre ego pointe son nez, ect…
- La vigilance MÉFIANT est le lieu d’une posture pédagogique plus présente, un «FAIRE AVEC» où l’accompagnement est plus directif, principalement pour des raisons de sécurité et pour être certain d’éviter le danger (par exemple la zone des pentes à 30°). Mais toujours dans le mode du « Faire ensemble » où l’un des membres du groupe assume le leadership de la trace. Mettre en place une organisation du groupe par binôme est également un mode opératoire très efficace.
- La vigilance ALERTÉ est forcément plus complexe et nécessite déjà des compétences de nivologie et de conduite de groupe bien assimilées par les membres du groupe. Le leader est alors dans une posture de « FAIRE FAIRE» beaucoup plus structurée et à proximité immédiate de la personne qui conduit le groupe, car il est impératif de diminuer le risque par un déplacement de chacun approprié et restreint.
Si la situation devient plus complexe, il est alors souhaitable de basculer immédiatement dans le mode du « FAIRE SOIT MÊME ».
Ce changement de posture devrait (si possible) s’accompagner d’explications et au débriefing d’une analyse argumentée et éclairée des différents points de vue.
C’est l’image du capitaine qui reprend la barre !
- La vigilance HASARDEUX ne devrait (de mon point de vue) jamais être envisagée !
La posture du leader est illustré par sa décision de « Renoncer et Construire un nouveau projet » avec l’ensemble du groupe bien entendu.
Modes de vigilance et pédagogie
Tout se joue dans une préparation adéquate.
Une préparation forcément élaboré ensemble avec tous les participants qui permet de dresser une cartographie de la sortie avec un positionnement clair des différents modes de vigilance et surtout des lieux précis de prise de décision. Ce sera également, au retour, le support du briefing de la sortie (c’est le 3×4 !).
Faire un croquis, même très schématique, de cette répartition des vigilances peut permettre à chacun de mieux visualiser cette réflexion et se positionner dans son évolution sur le terrain au sein du groupe.
La mise en oeuvre de ce type de préparation a été illustré dans cet article « RETEX ski de randonnée ».
Il est intéressant de constater le passage d’un mode ALERTÉ à un mode DÉTENDU, simplement parce que la situation nivologique constatée n’est pas identique à celle imaginée grâce au BERA. Ici, l’observation fine des 6 paramètres (de Duclos) a été particulièrement utile pour construire ce basculement d’un mode de vigilance à un autre (concrètement : la température et l’absence de strate fragile).
S’il est intéressant de réfléchir à la répartition des modes de vigilance et des postures pédagogiques tout au long de la sortie d’autres questions deviennent importantes :
- – Qu’est-ce qui provoque le changement de mode ?
- – Comment se prend la décision ?
- – Quelle connaissance ont les membres du groupes de la notion de mode de vigilance / de posture pédagogique
Habituellement, dans une préparation de sortie de ski de randonnée, il était d’usage d’identifier les passages difficiles ou complexes, ici il s’agit plutôt de porter une attention à l’ensemble de la sortie en qualifiant tout le déroulé de l’itinéraire et en particulier les lieux potentiels de la Vigilance DETENDU.
Chaque changement de types de vigilance donne lieu à un point de décision (de discussion), pour valider ou non celui-ci et poser des mots sur ce changement, lors de la préparation et surtout sur le terrain.
Au débriefing, valider la pertinence de notre représentation de ces vigilances sera l’une des questions clefs à aborder.
Modes de vigilance et pédagogie
Un changement de représentation
Alain Duclos a utilisé une représentation sous forme de carré où chaque vigilance a une importance identique. Je propose une visualisation sous la forme d’un triangle inversé, avec seulement 3 modes de vigilance.
Le socle du triangle, le mode DÉTENDU, est placé en haut, car il se doit d’être le lieu prioritaire de la pratique, où plutôt d’une pratique sereine axée sur le plaisir de faire ensemble. Et, à chaque vigilance est associée une posture pédagogique du leader.
Pour la petite pointe du triangle en rouge, il faudrait expliciter différentes postures :
– le « Faire avec » qui se transforme quand la situation est trop complexe (par exemple avec une charge émotionnelle trop présente) ou quand la compétence de la personne accompagnée n’est pas suffisante en,
– « Faire soi-même » et concrètement reprendre la barre.
-ou encore : Renoncer et « Construire un nouveau projet » avec l’ensemble du groupe bien entendu.
Mode de vigilance et BERA
Il est intéressant de voir de quelle manière, sur le même itinéraire, des BERA différents modifient la cartographie des vigilances.
Car forcément, le choix de « bonnes » conditions pour effectuer une sortie permet d’étendre le mode DETENDU. Ce qui permet d’insister sur l’importance de ce choix initial plutôt que de proposer « le renoncement comme changement de paradigme » (Denis Crabières, 2019 in Neige & Avalanche ANENA)
Le Retex de la traversée du refuge du Pic du Mas de La Grave au Refuge du Goléon est un bel exemple de terrain complexe et de la nécessité de s’adapter aux conditions nivologiques (en fonction aussi des compétences du groupe et du leader).
La montée au refuge du Goléon, avec son goulet d’accès directement exposé aux avalanches (voir Data Avalanche), sans possibilité d’évitement est un bon exemple de l’utilisation des modes de vigilance associée au BERA général (lors de la préparation) puis à un BERA local issu de l’observation directe sur le terrain.
Il s’agit dans ce cas de passer d’un mode HASARDEUX (car le mode MÉFIANT ne peut pas s’appliquer) directement à un mode DÉTENDU (avec donc un risque ZERO !)
Les vigilances et le rapport au danger, aux risques.
Les vigilances encadrées confortent une posture du leader garant de la sécurité du groupe qui n’occulte surtout pas ses autres postures :
– d’animateur,
– de pédagogue
– et d’accompagnant.
Une remarque :
Le leader n’est pas le seul garant de la sécurité du groupe. Tous les membres du groupe ont leur part à jouer. Une manière de dire que la notion de co-responsabilité est importante (voir indispensable) dans les activités de montagne.
Mais comment être certain qu’une communication fluide se mette en place sur ce sujet ? Et, en cas d’accident grave, que va-t-il se passer ?
Quand le leader a pris le temps, avec le groupe, de faire une préparation de la sortie en positionnant précisément les modes de vigilances sur la carte de la sortie prévue, en relation avec le BERA global, les modes de vigilance permettent d’être plus clair sur notre perception du risque à prendre en compte durant la randonnée.
Concrètement :
- en pouvant la partager facilement avec les membres du groupe (qui connaissent bien sûr les différents modes de vigilance).
- en pouvant les commenter, tous ensemble.
- et surtout en pouvant identifier les lieux précis où un mode de vigilance change (la frontière entre deux modes) et sur les critères d’observation susceptibles de faire évoluer un mode de vigilance vers un autre (en plus ou en moins).
Par exemple, en utilisant « les 6 paramètre à surveiller ».
Si la notion d’élévation de température augmente le risque à tel endroit et a permit d’identifier le passage d’un mode de vigilance DÉTENDU à ALERTÉ, dans la préparation, à l’instant d’aborder cette zone (le point de décision dument localisé et connu de tous), si la température n’a aucune conséquence sur l’évolution de la stabilité du manteau neigeux, ce mode de vigilance change radicalement de nature pour devenir MÉFIANT ou même DÉTENDU.
(Concrètement, c’est le passage des 4 torrents dans mon RETEX du 3 Mars).
Voici une autre situation classique que vous avez certainement vécu.
Dans la préparation, un passage précis de votre randonnée présente : une accumulation, des pentes à 30° et peut être une strate fragile.
Vous êtes vraiment inquiet et à juste titre. Vous décidez d’aller voir en réalisant un itinéraire à proximité.
Mais, en arrivant à l’endroit identifié : tout est déjà partie ! Il n’y a plus aucun danger d’avalanche.
Damned ! La situation de vigilance change alors radicalement. Et alors que vous aviez imaginé changer d’itinéraire ou adapter le déplacement du groupe en mode ALERTÉ, vous voici en mode DÉTENDU.
Pas belle la vie… ?
La question de la distance entre les membres du groupe en fonction des vigilances.
Une méta règle du faire ensemble est d’être ensemble, pour facilité la communication et les interrelations et donc de rester à proximité immédiate. Elle est énoncée ainsi : « les membres du groupe évoluent en restant à vue et à porter de voix sans crier (du leader et des autres participants) », ce qui correspond à un périmètre d’une vingtaine de mètres maximum.
L’éparpillement de certains groupes indique clairement que celui-ci ne fonctionne pas dans le « Faire ensemble ».
Pourtant, dans le mode DÉTENDU, la distance acceptée entre les membres d’un groupe peut être beaucoup plus importante (hors de portée de voie) et c’est une particularité de ce mode de vigilance, car il est possible d’augmenter cette distance sans conséquence du point d vue du risque d’avalanche. Mais pour autant est-ce judicieux pour des notions de cohésion de groupe, de convivialité bref : « d’être et de faire ensemble ».
Par contre, pour les autres modes, la distante entre les membres se doit d’être de plus en plus réduite. Sans aménagement ou négociation possible.
Pour aller plus loin…
Cet article n’est qu’une première ébauche, un essai de formulation de ma réflexion durant mon hiver 2020 sur les skis.
Cette réflexion sur les modes de vigilance peut également se penser pour d’autres domaines que les avalanches.
Par exemple :
– pour la navigation et les compétences cartographiques
– pour la forme physique et la gestion du groupe.
Cet article est donc le point de départ d’une forme de conversation avec les personnes intéressées par ce sujet, par cet éclairage pédagogique.
N’hésitez surtout pas à intervenir, donner votre avis, mettre un commentaire ou me contacter directement par le mail perso ou au téléphone (06 42 90 75 34). (Voir la page Contact…)
Bel hiver à tous…
Paulo_un peu au coin du feu, il neige ce matin…
le 9 Mars 2020
Puis, aux Hières, en phase confinement
à partir du 18 Mars 2020
Je trouve que cette méthode n’est pas réaliste car elle ne tient pas compte d’un paramétre important dans la pratique de guide ( surtout les jeunes guides) qui est de prendre du travail en agence . Le travail pédagogique sur la sortie du lendemain n’est pas forcément possible , il faut d’emblée être dans le mode vigilant !!! En revanche avec ses propres clients cette démarche explicative est intéressante mais recquiert du temps …
D’autre part, à force de simplifier par des images la nivologie on finit par faire croire que c’est simple !! La neige est infiniment complexe et ce qui semble être valable pour une pente ne l’est pas pour l’autre ….
Salut Laurent
« cette méthode n’est pas réaliste » !
Voici au moins un avis tranché…,
mais j’aimerais que tu m’en dises un peu plus. En quoi n’est elle pas réaliste ? As-tu des exemples concrets pour illustrer ton propos ?
Parles-tu des modes de vigilance de Duclos ou de leur utilisation dans une réflexion pédagogique d’un projet co-construit par les participants à une randonnée.
Pour être aussi catégorique, je suppose que tu as expérimenté de nombreuse fois cet outil d’aide à la décision. Personnellement, je n’en suis qu’au début d’une utilisation pratique et systématique des modes de vigilance d’Alain Duclos et ton avis (s’il est argumenté) est forcément très intéressant.
Je t’en remercie d’avance.
Bien évidement, dans une réalité d’agence et simplement à cause de la taille des groupes (souvent + de 6 personnes) il est particulièrement difficile pour un leader professionnel d’avoir une autre posture que celle d’un guide qui simplement passe devant.
Difficile d’être un accompagnant, dans le sens ou l’entend le Dr Maela PAUL.
Et il me semble que les jeunes guides de part leur formation initiale, sont beaucoup mieux formés que nous au PFH (ou au moins que je ne l’était).
Ensuite…, chacun est libre d’accepter ou non (dans une certaine mesure) le style de travail qu’on lui propose. Et sur une semaine, il est certainement possible d’utiliser la dynamique d’une journée pour co construire la suivante. C’est ce que j’appelle un groupe auto apprenant.
Je t’invite également à donner ton avis sur un précédent article, qui est aussi le fondement théorique de cette réflexion.
http://www.paulogrobel.com/faire-ensemble-article/
On peut bien évidemment échanger au téléphone… Mon n° 06 42 90 75 34.
Le confinement actuel étant propice à l’échange.
Salutations depuis La Grave
Paulo Grobel- bien sagement confiné
Salut Laurent et surtout merci de ta réponse.
Je vais donc reprendre ton texte pour y inclure mes réflexions. d’emblée je vois très bien la situation que tu évoques au Passon. C’est un peu la cata…
De mon côté, j’ai la chance de ne pas y être confronté, j’ai souvent été cet hiver dans des randos sans personne d’autres et même sans trace.
Un véritable luxe !
« Bonjour Paulo,
Je parle des modes de vigilance de Duclos, je trouve ça beaucoup trop flous ( mode détendu, mode vigilant, mode hasardeux etc… ). La réalité sur le terrain est bien plus complexe : dans une seule et même rando tu peux passer par les 3 modes et pourtant tu continues ta rando ! A quel moment tu choisis de renoncer ? »
Ok…
Et effectivement, le passage sur le terrain d’un mode à un autre est très compliqué. C’est vraiment un sujet intéressant pour améliorer cet outil. Et c’est ce que j’ai travaillé sur le terrain avec un stage de l’ANENA.
L’article sur la traversée au-dessus de la maison : http://www.paulogrobel.com/retex-ski-de-randonnee-3-mars-2020/ essayait justement d’illustrer cela. Peut être l’as tu parcouru ?
« C’est une méthode qui laisse trop de place me semble t’il à la subjectivité du guide ( détendu, vigilant, renoncement…) alors que la méthode Munter est bien plus contraignante : ce jour tu appliquais Munter tu n’allais pas au Passon ! »
Oui, mais on est dans deux styles d’outil très différents, perso je n’utilise jamais la réduction de Munter. Même si je la connais et que je l’ai même enseigné. Mais pas certain non plus que tes collègues au Passon utilisaient la réflexion de Duclos.
« Voila ma réflexion Paulo : ce n’est pas une remise en question de cette méthode c’est que je la trouve imprécise, trop sujette à interprétation. »
Peut être qu’en essayant justement d’échanger sur nos pratiques, en l’utilisant le mieux possible, c’est un moyen de la rendre plus opérante sur le terrain. Plus concrète aussi et donc plus utile.
« En revanche, la démarche pédagogique d’avant course qui consiste à associer les clients au choix du terrain et de la course me parait intéressant. »
J’aurais écrit indispensable !
Et OUI, c’était là le sujet de mon article « mode de vigilance & pédagogie ».
mais surtout qui ne se limite pas à la préparation avant la course, mais bien aussi durant toute la course (l’échange avec nos clients/compagnons de course) et surtout au débriefing.
Et c’est surtout cette réflexion sur la posture du guide qui m’intéresse et que j’aimerais amélioré, en expliquant, en échangeant et en continuant à écrire.
C’est donc une remise en question de notre posture de guide (et pas seulement en lui ajoutant une dimension pédagogique). J’aimerais parler aussi de sa tache d’accompagnant qui est encore plus complexe.
Au plaisir de se croiser un jour, peut être.
Bonne continuation.
Paulo_at home
Je voulais ajouter : C’est bien cette image du triangle inversé. On imagine bien les différentes zones de vigilance et on se représente bien la zone de vigilance détendu ou il faut rester au maximum. (C’est la plus grosse!!) Je trouve que c’est bien plus parlant que l’affiche du dessus. Déjà on élimine systématiquement la zone la plus dangereuse et on se représente nettement les conséquences que peut avoir la présence d’un groupe dans l’une ou l’autre zone avec les postures à adapter.
Peut être que je me répète mais merci ça m’a donné une vision bien plus claire de la situation.
Merci Georges pour ce commentaire sur la représentation des modes de vigilance.
C’est une vraie question que je me pose (… posait).
Il me semble aussi que d’avoir inversé cette représentation (avec le socle de la pratique Détendu en haut) induit un questionnement sur nos choix de terrain et sur cette forme d’injonction sociétales que « le plus » est forcément mieux (c’est aussi notre négociation avec le risque acceptable, la perception de notre engagement personnel et groupal dans l’activité, etc). Notre représentation du risque en quelque sorte.
Bon ski à toi et au plaisir d’une prochaine rencontre.
Paulo_même pas sur les skis
Un message d’Alain Duclos (que je remercie au passage).
« Peut être une idée à mijoter :
• Je vois et je comprends que tu réfutes le mode hasardeux.
• Après avoir pas mal tourné autour du pot, je réalise qu’il serait peut-être préférable d’opter pour cette formule : la perception du mode hasardeux doit juste conduire à « concevoir une autre projet » (lequel permettra de passer une journée encore meilleure, dans la plupart des cas). Peut être ton triangle (que j’aime beaucoup) pourrait-il être complété avec « faire avec -faire un autre projet » ? »
L’ avis d’un expert de l’ANENA.
« Bonjour,
Réflexion très intéressante.
L’exemple illustré de traversée est très pédagogique.
La présentation en entonnoir peut avoir un intérêt, car elle indique visuellement que l’éventail des possibilités se réduit.
Je suis en revanche plus réservé sur certains termes employés :
« laisser faire » : à qualifier (sous surveillance ?) « faire faire » , je le réserverais au 3ème mode (alerté) avec un qualificatif (strictement ?) Entre les 2, en mode méfiant, on n’est pas encore en danger, mais on observe une zone de danger possible. Alors, « faire observer et faire faire » ?
A +
Jean »
Quelques remarques :
1… Attention à ne pas surcharger les temps d’analyse sur place, pour qu’ils ne prennent le pas sur l’action elle-même. Il y a un équilibre à trouver entre le fonctionnement collectif et les besoins individuels de chacun.
2… Il est nécessaire de faire la distinction entre deux types de situation : un mode enseignement et un mode fonctionnement. En fonction de la situation, la tonalité de la posture du leader n’est pas la même, comme le fonctionnement du groupe et les interrelations horizontales entre les participants et avec le leader.
3… Cette dimension pédagogique est essentiellement explicitée du point de vue du leader (comme souvent !), à creuser comment ces différents modes de vigilance impactent les relations et la communication entre les membres du groupe. Et donc comment le PFH peut moduler la prise de décision du leader particulièrement au moment du passage d’un mode à un autre.
L’usage actuel des visio conférences a permis d’avancer sur ce sujet avec le groupe des formateurs de l’ANENA :
avec Maud Vampoule , aspirant guide de haute montagne, doctorante en STAPS, Xavier Pasquier, AMM et formateur Anena référent technique Pyrénées, Yves novel, AMM et formateur reférent Anena Alpes du Sud, Jean Le Corre, formateur et chargé de mission Anena Pyrénées, S. Escande, GHM, formateur et conseiller technique Anena
Quelques réflexions personnelles :
Au sujet du « Griboullon »
L’idée de ce « Gribouillon des vigilances », à faire avec le groupe dans la phase de préparation me va vraiment bien. Il permet que chaque participant (leader compris) ait une vision claire du déroulement envisagé de la sortie et surtout de la manière dont le projet sera vécu (investi) par les participants (l’espace d’évolution), avec les points de décisions à argumenter bien identifiés sur le terrain (d’autres peuvent bien sûr apparaître en cours de route).
Un temps d’analyse post sortie de ce gribouillon des vigilances me semble également indispensable (dans le cadre du 3X4, déjà en place), c’est le « Gribouillon REX positif ».
Pour la représentation.
« Le triangle inversé », il faut y intégrer le mode hasardeux (avec la remarque associée : à éviter le mieux possible).
J’aimerais voir apparaitre dans le croquis A LA FOIS, la posture pédagogique du Leader et l’espace d’évolution des participants?
Est-ce possible directement à l’intérieur du triangle inversé.
Pour une meilleur définition de ces vigilances
La formulation proposée ci-dessous me semble particulièrement pertinente, j’ai juste apporté un complément au mode Hasardeux.
La question de comment présenter tout ça reste posée.
Mode détendu
Posture péda : « Laisser faire »
Communication : pas d’influence, échanges libres, pas de consignes, contact visuel
Espace d’évolution du groupe : champ de l’expérimentation, communication libre
Mode Méfiant
Posture péda : « faire faire »
Communication : consigne (préciser les indicateurs de danger), contrôle, proximité nécessaire
Espace d’évolution du groupe : encadrement du champ de l’expérimentation,
Mode Alerté
Posture péda : « faire avec » / « faire par le leader »
Communication : consignes strictes, proximité obligatoire
Espace d’évolution du groupe : confiné !! réduit à un champ très limité et de plus en plus limité si la situation se dégrade.
Mode hasardeux
Posture péda : gestion d’urgence– « renoncement et redéfinition d’un projet alternatif »
Communication : minimal dans l’action, reportée pour le retex (gestion par le leader)
et analysé par le groupe pour dégager des mesures correctives.
Dans les suggestions :
Insister sur le membership car c’est ce qui reste le plus difficile à faire exister dans nos publications et réflexions (je me fais souvent prendre à aborder la question de mon point de vue de leader, ce qui est bien évidemment limité, limitant et caricaturale du mode de pensée actuel et dominant).
Ouvrir la réflexion sur les autres sujets d’une vigilance globale, mais ne surtout pas les inclure à une réflexion sur celle-ci (les avalanches) au risque de dévoyer le sens et les objectifs de « la vigilance encadrée » de Alain Duclos.
Sujets proposés :
– Des vigilances de facteurs humains (niveau physique, hétérogénéité, contrainte horaire)
– Des vigilances sur les compétences de lecture de carte et de navigation (avec une visibilité + ou – dégradée)
– Des vigilances alpinistiques
Ping : Le guide de haute montagne et la posture d'accompagnement.
Bonjour,
Quelques réflexions perso sur ce sujet qui m’intéresse ….
Depuis que j’ai trouvé le tableau ci-dessous :
( je n’arrive pas à le coller….
…il s’agit je pense du premier tableau d’alain Duclos publié dans le premier montagne mag … il y a qqe années…)
J’essaie d’appliquer cette méthode plutôt d’ailleurs majoritairement en canyon … mais aussi raquettes ou ski de rando et alpi…
Je pense d’ailleurs que ce mode de fonctionnement du groupe est applicable à tous les sports de montagne…
Lors du briefing de départ, j’explique aux participants le fonctionnement par tronçons (en principe identifiés en salle, les contraintes de chaque mode et ce que j’attends d’eux…)
= une prep en salle avec carte et topo de la course est un + et permet à chacun d’identifier et de comprendre la démarche, donc de se l’approprier.
On changera de mode aux
points (passages) clés = décision
ou points (passages) de sécurité = pose
Lors de la progression : Le changement de mode a (à mon avis) pour gros intérêt de prévenir les participants qu’on rentre dans une zone de turbulence = attachez vos ceintures / finissez votre café, ça va peut-être secouer… ou d’ailleurs qu’on en sort = allez aux toilettes / mangez / buvez / adaptez l’équipement… là, on est tranquille !
Je pense qu’en cas de pépin, la fameuse phase de « sidération » qui est toujours difficile à gérer pour le « cadre » s’en trouve écourtée puisque tous savent que « ici et maintenant » : tous les clignotants ne sont pas au vert. Donc, s’il y a eu quelque exercice ou manœuvre de secours avant, chacun doit savoir instantanément ce qu’il a à faire….
… y compris si c’est le guide ou le cadre qui est enseveli…
La représentation en triangle est effectivement plus « visuelle » que le tableau ci-dessus …
C’est mieux !
Le mode hasardeux : moi, je l’intègrerais tout en bas du triangle en noir = posture pédagogique = échapper dans les meilleures conditions = problème imprévu ou non anticipé (able ?) qui remet en cause l’objectif…. Voire le retour….
Pour moi : le mode méfiance correspond plutôt à un passage technique (= difficulté connue) dont l’abordage a été réfléchi et anticipé lors de la prep et donne souvent lieu à une stratégie de réduction du risque…
nous arrivons au couloir XXXX que nous avons localisé sur la carte… nous allons passer en mode méfiance = passer 1 par 1 et prendre 20m de distance… etc…)
Le mode alerté correspond pour moi plutôt à une difficulté non anticipée (un imprévu) mais jugée surmontable…
nous arrivons au couloir XXX que nous avons localisé sur la carte, les observables sur les heures précédentes sont perçus comme non défavorables donc, nous allons, comme prévu, traverser ce couloir, mais jojo a cassé ses crampons ….Nous allons passer en mode alerté et l’encorder par ex au milieu d’une cordée de 3 pour le couloir… 1 observateur en amont, 1 autre en aval… etc…
Le mode détendu est, je pense, le plus « piégeux » car il faut être bien sûr que le risque est bien nul ! Sinon c’est le retour à la case départ… l’avalanche surprend tout le monde et tout ce qui précède n’aura servi à rien = c’est la turbulence surprise dans l’avion, il y a ds personnes debout qui vont rendre visite au plafond et d’autres qui vont se renverser le café sur le pantalon…
Voilà, en canyon ça joue sur : quelle stratégie de franchissement d’obstacle doit-on adopter … ?
Avec quel « public » Avec quel niveau de vigilance : météo / niveau d’eau / hauteur des rappels / confort des départs / frottements / froid = attente au relais/ communication / glissades / longueur des biefs « nagés »/ … etc…
Les éléments sont différents mais l’approche est à mon avis, sensiblement la même…
Voilà mon « retex » et j’espère qqs pistes de réflexion …
Amitiés
JPP
Merci beaucoup JP pour ce commentaire très instructif sur ta manière d’utiliser les modes de vigilance. C’est surtout très encourageant de constater que d’autres guides utilisent cet outil et surtout l’adaptent à leurs pratiques.
Au plaisir de se croiser en montagne bientôt.
Salutations depuis La Grave
Paulo_sagement confiné
Une petite réflexion supplémentaire sur le mode « hasardeux »:
je pense que le découpage en 4 « modes » est pertinent …. c’est plus flexible et donne plus de précision que 3…
par contre, pour ce dernier étage, noir, la terminologie et l’état de ce mode sont peut être à affiner/modifier…
Si dés le départ, tu as identifié des signes évidents de danger et qu’on ne peut pas les réduire = tu n’y vas pas ! Tu ne vas pas démarrer ta course en confiant ta vie au HASARD !
donc effectivement là, ce mode hasardeux n’est pas adapté !
Par contre, en cours de sortie peut se présenter une situation inédite, non prévue, un aléa « surprise » qui s’invite et qu’il faut alors gérer = « échapper » au plus vite et au plus commode…si possible… ou stand by sur place …. ou ?
….des conditions météo qui se dégradent en alpi, une crue subite en canyon etc…
Je pense par ex : à la tempête meurtrière sur le Thorong-La en oct 14…
Les conditions exceptionnelles peuvent nous mettre dans le noir et en fonctionnement dégradé…
Chez nous, on a crée un verbe pour ce mode : c’est béréziner = organiser une Bérézina !
voilà, tu auras compris ma réflexion !
…. je ne pense pas que la terminologie : « mode Berézina » soit trés pédagogique !
Reste donc peut être à définir les bonnes attitudes et …. trouver le bon mot !
Bon déconfinement !
JPP
Super de continuer cette conversation.
Et effectivement le mode hasardeux à été repris et ajouté au triangle dans nos discussions avec le groupe des formateurs ANENA.
Car, comme le dit Debouck on fait des erreurs et même en ayant préparer le mieux possible la sortie on peut se retrouver piégé. Il FAUT alors s’en sortir, et si possible sans conséquence grave. Avec cette nécessité de ne pas fonctionner/tomber en mode dégradé. Ni le leader, ni les membres.
J’aime beaucoup ton nouveau verbe de Béréziner. Qui va très bien pour qualifier ce mode hasardeux. Et je pense même qu’il serait intéressant de le proposer. Pourquoi pas carrément un Mode Bérézina. Ça veut clairement dire que c’est la cata, qu’on a pas envie de s’y trouver (mais que parfois on s’y trouve) et que c’est un mode retraite pour s’extraire du piège dans lequel on c’est soit même fourré.
Pour moi, c’est vraiment le bon mot !
Merci pour cette proposition, je vais en parler au Seb (Escande).
Salutations himalayennes
Paulo_sagement à la maison
Bonjour,
Pour faire suite …
j’ai trouvé le tableau de l' »adaptation » des modes de vigilance encadrés que j’utilisais plus ou moins « empiriquement » en canyon mis en forme par les cadres de la FFS : ça conforte mon sentiment que cet outil est quasi « universel » et adaptable à plus ou moins tous les sports de montagne en milieu hostile ou périlleux.
ici le mode « hasardeux » qui suscite discussion a été remplacé par le mode « déraisonnable » ….
UN OUTIL DE PRÉVENTION DES RISQUES : LES MODES DE VIGILANCE ENCADRÉS EN CANYONISME
copyright : Fédération Française de Spéléologie
A partir des résultats du 3X3, le cadre et les équipiers adopteront un mode de vigilance et un comportement adapté au niveau du risque identifié.
MODE « DÉTENDU »
Aucun indicateur alarmant n’a été identifié.
Sauf observations inattendues le projet est mené comme prévu. Le cadre reste attentif à l’éventuel
signalement d’un danger qu’il n’aurait pas anticipé
VIGILANCE NORMALE
MODE « MÉFIANCE »
Des indicateurs à surveiller ont été identifiés : Débit/ évolution météo / état du groupe
Vigilance accrue concernant l’évolution de ces indicateurs Anticipation d’une modification des
modes de franchissement d’obstacle pour éviter de passer en mode alerte
VIGILANCE RENFORCÉE : ADAPTATION DU MODE DE FRANCHISSEMENT DES OBSTACLES
MODE «ALERTE»
Les indicateurs surveillés
(Débit/ évolution météo / état du groupe) s’aggravent.
La gestion de la sécurité est compromise malgré l’adaptation maximale des modes de franchissement
d’obstacle.
À CHAQUE OBSTACLE :
IDENTIFIER LES DANGERS ET GÉRER LES RISQUES.
SORTIR A LA PREMIÈRE ÉCHAPPATOIRE OU ENVISAGER L’ATTENTE
MODE «DÉRAISONNABLE»
Une analyse rationnelle/lucide montrerait que la progression est dangereuse.
Il n’est pas possible d’en limiter raisonnablement les risques .
LA PROBABILITÉ D’ACCIDENT GRAVE OU MORTELLE EST GRANDE :
– RENONCER À S’ENGAGER
– RENONCER À POURSUIVRE LA PROGRESSION :
GÉRER L’ATTENTE
… Commence à faire froid en canyon … va falloir plutôt aller affûter les carres !
Cordialement
JPP
Ping : "Le gribouillon des Vigilance", par Paulo Grobel, guide de haute montagne
Ping : "Gribouillon des vigilances", mode d'emploi... , par Paulo Grobel
Ping : Initiation ++ au ski de randonnée dans les Cerces avec Paulo Grobel
Ping : 1er raid au Pays de la Meije, «Entre Goléon et Pic du Mas de La Grave ».
Ping : CSV, introduction et historique par Paulo Grobel
Ping : « En Beaufortain, des courses classiques aux parcours alpins»