Quelle définition et quelle représentation de ces « autres vigilances »sur le schéma de la Carto des Vigilances.
Nous voici dans deux types de vigilance très éloignés de la nivologie. Si la situation concrète qui caractérise ces vigilances peut être analysée et décrite précisément par des caractéristiques physiques (la pente et l’orientation, sa morphologie, son caractère exposé) il n’en va pas de même pour ce qu’elles provoquent auprès des différents participants et pour le groupe.
Comme pour la vigilance neige et les avalanches, les représentations mentales, les émotions, le ressenti sont éminemment personnels et d’une grande complexité, d’une grande richesse aussi. Nous sommes au cœur des facteurs humains et de la dimension sociale, groupale de l’activité montagne en milieu enneigé.
La vigilance « risque de chute (ou de glissade).
- Peut-on qualifier de « raide » une pente à plus de 30° ?
- Peut-on utiliser ce seuil, cette donnée pour identifier un passage pouvant présenter un risque de glissade, de chute ? À la montée, ou à la descente.
- À priori OUI, pour les deux questions…
Bien évidemment, les conditions de neige de l’instant, imaginées lors de la préparation ou observées sur le terrain, sont capitales. Tout le monde connait ou imagine la réalité d’une pente à plus de 30° en neige dure ou gelée, ou pire, verglacée.
La notion d’exposition.
C’est la conséquence d’une chute ou d’une glissade. Elle peut être sans conséquence, ou au contraire plus ou moins traumatisante ou même dramatique.
Il est très simple d’utiliser la qualification et les trois couleurs maintenant classiques de la CSV.
- Le vert pour une vigilance « risque de chute », qui peut être limité.
- Le jaune pour un mode Méfiant, car plus exposé.
- Le rouge pour un mode Alerté, où la chute est interdite.
Si cette vigilance « risque de chute » peut être identifiée durant la préparation, c’est sur le terrain que les différences entre ces trois modes seront les plus visibles.
La notion d'engagement.
Voici un facteur éminemment personnel ! (Mais pas que…)
Face à une situation donnée, notre capacité à nous engager (ou non) dans un passage, « à risquer notre vie » (ou notre intégrité) est un élément clef de la pratique de la montagne, qu’elle soit hivernale ou estivale. Cette notion d’engagement a été mainte fois questionné et débattu dans la littérature de montagne.
Identifier un passage exposé, l’analyser et prendre décision d’y aller ou pas, de s’engager ou pas est à la fois une question individuelle et groupale. Le challenge de prendre la bonne décision est bien évidement central, pour le leader comme pour les participants. Et pouvoir aborder ce sujet, sereinement (!?), durant la préparation de la CSV devrait faciliter la prise de décision, l’organisation et le vécu du groupe sur le terrain.
La vigilance « Alpinisme ».
C’est la suite logique d’un mode MÉFIANT ou ALERTÉ de la vigilance « risque de chute ».
Quand les conséquences d’une chute sont trop importantes, il est alors nécessaire d’avoir recours à du matériel technique d’alpinisme comme les crampons ou la corde. Il existe de multiples possibilités dans l’utilisation de ce matériel. Plus on utilise de matériel et de techniques, plus on réduit l’exposition d’un passage. C’est l’observation du terrain (et, durant la préparation l’analyse des informations disponibles), qui détermine le type de vigilance et le matériel a utiliser.
Voici une première proposition de représentation.
- Avec les crampons et éventuellement le piolet, mais sans utilisation de la corde. Donc plutôt DÉTENDU, en vert.
- Avec utilisation ponctuelle de la corde, ou en corde courte. MÉFIANT et donc dessiné en jaune.
- En utilisant la corde pour une évolution en longueurs, ou en rappel. Forcément ALERTÉ et en rouge.
Pour matérialiser ces types de vigilance « risque de chute ou Alpinisme » sur le croquis de la CSV, il sera parfois nécessaire d’écrire clairement, en + de la couleur, le mode de vigilance identifié. Même si, à priori, la vigilance nivologique devrait être en mode DÉTENDU, sur la section concernée.
Les facteurs humains et les vigilances « Risque de chute » et « Alpinisme ».
Les facteurs humains sont très présents dans ces deux vigilances.
Pour le risque de chute, une préparation très précise peut faciliter l’expression des inquiétudes, des difficultés et des compétences de chacun, pour favoriser également une collaboration entre les participants.
Dans la vigilance Alpinisme, le fonctionnement du groupe est profondément impacté par l’utilisation de la corde (main-courante, rappel) et une progression encordée, avec encore plus d’importance pour les connaissances et les savoir-faire de chacun.
Dans la CSV et le Faire Ensemble, la mise en perspective des différentes vigilances (cartographie, risque de chute, terrain glaciaire, alpinisme) en complément de la vigilance nivologique, et la possibilité de mieux prendre en compte les facteurs humains permettent d’avoir une vision plus globale des activités hivernales et de rendre l’organisation d’une sortie plus fiable.
La question est de mieux comprendre les « interactions entre ces différentes vigilances ».
- Certaines viennent-elles en occulter d’autres à certains moments ?
- Et quel est l’impact de ces interactions sur nos décisions ?
L’expérience que nous avons vécu lors de la GTA 2022, et décrit dans ce RETEX sur mon site, illustre ce questionnement.
Et je vous invite également à parcourir cette page dédiée à la Vigilance Glacier, qui parfois s’invite au côté de la vigilance Alpinisme.
Une série d’articles sur la CSV, la Cartographie Systémique des Vigilance. À retrouver sur mon site…
- « CSV, introduction et historique »
- « CSV : la Cartographie Systémique des Vigilances, 3 mots à définir. »
- « La CSV : deux mots clefs, Intégration et interactions »
- « Avec la CSV, du 3 x 3 a un 4 x 3 itératif. »
- « La CSV et la Vigilance GLACIER », une proposition de représentation.
- CSV, de la vigilance « Risque de chute » à la vigilance «Alpinisme ».
- « CSV, un RETEX sur les facteurs humains »
- « CSV, les témoignages des utilisateurs »
- « L’article fondateur de la CSV dans la revue de l’ANENA »
Et, le prochain post sera consacré à la Vigilance Encadrée d’Alain Duclos.
- « CSV et la vigilance encadrée, une intégration logique… »
Merci pour tout ce travail qu’il devient difficile de suivre tant il foisonne !
Juste une remarque (peut-être une ânerie) : et si l’encordement court sur neige/glace était une des situations demandant le niveau de vigilance le plus élevé ?
https://alpinerecreation.com/pdf/safetyresearch_verbunden_bis_in_den_tod_en.pdf
et
https://alpinerecreation.com/pdf/safetyresearch_verbunden_bis_in_den_tod.pdf (pour les figures qui ne sont pas présentes dans la version en anglais !)
Merci de ce commentaire.
OUI effectivement.Il est nécessaire de modifier ce chapitre de la Vigilance en pente de neige.
L’encordement est la Mesure choisie pour diminuer les Conséquences d’un Danger. C’est DCMR.
Il me semble qu’il faut caractériser la nature de la pente, le danger (ce qui est représenté par une couleur (vert, jaune ou rouge). Puis décider du mode de progression : sans corde, corde courte ou longueurs.
Pour la corde courte, effectivement le terrain est relativement simple, mais l’attention nécessaire est très élevée.
Ce sujet est éminemment intéressant. Pas sûr que des réponses uniquement techniques soit la solution (mais déjà un éclairage), tellement la situation est multifactorielle et donc complexe.
Au plaisir de continuer cette conversation.
Salutations de La Grave
Paulo Grobel